Témoignage : instruction en famille et phobie scolaire

Aujourd’hui, je donne la parole à Adélaïde qui a débuté l’instruction en famille après le diagnostic de phobie scolaire pour sa fille.

Il y a beaucoup de fantasmes autour de la notion de haut potentiel (les personnes dites précoces, HP ou zèbres). C’est souvent associé à une forme d’excellence et donc à une vision positive des apprentissages. Toutefois ces visions sont très éloignées de la réalité car la précocité est surtout une autre façon d’appréhender le monde et l’école peut être extrêmement difficile à vivre.

Dans ce témoignage, il n’est pas juste question de précocité, mais surtout de prise de conscience de la phobie scolaire (avec des professionnels formés et divers), d’équilibre familiale et du plaisir d’être ensemble.

Deux autres témoignages présentent une vision différente de l’IEF avec un enfant précoce :
→ Lili, maman solo
→ Michèle, dont le fils est dysgraphique

Par ailleurs, je vous invite à découvrir le compte Instagram d’Adelaïde pour suivre en photo les apprentissages et découvertes de sa fille.

À présent, place au témoignage !

Toutes les photos nous ont été fournies par Adelaïde.

Bonjour Adélaïde et bienvenue sur Mon autre reflet. Peux-tu te présenter, toi et ta famille ?
Bonjour, et merci pour l’accueil !
Je suis donc Adélaïde, j’ai 35 ans, je suis conseillère en écriture en free-lance. Je suis mariée à Jérôme, fonctionnaire d’État, et nous sommes les parents de Bibou (surnom), notre fille de 6 ans. Nous vivons dans le Nord de la France. Nous sommes une famille de zèbres… Et nous instruisons Bibou en famille depuis septembre 2020.

insstruction en famille phobie scolaire et précocité

Aujourd’hui tu utilises sans hésitation le terme « phobie scolaire » pour désigner ce que vivait ta fille car vous avez rencontré des professionnels. Peux-tu revenir sur le chemin que vous avez parcouru, des maux de ventre de ton enfant jusqu’au diagnostic ?
Le parcours scolaire de Bibou a été compliqué dès son entrée à l’école. Par exemple, la maîtresse de petite section nous a appris au début du dernier trimestre cette année-là que Bibou avait passé les deux premiers trimestres assise seule sur le banc car elle refusait de participer aux activités avec les autres enfants…
Mais c’est vraiment en début d’année scolaire dernière, à son entrée en grande section, que ça s’est intensifié. Elle a très mal vécu les évaluations menées dès la rentrée, elle se mettait une pression incroyable, était inconsolable le soir parce qu’elle n’avait, selon ses dires, « pas réussi des choses alors que les copains savaient les faire ! ». Elle était très en colère contre elle-même et pleurait tout le temps. Notre petite fille vive et souriante s’était soudainement éteinte, elle était à fleur de peau, rentrait dans des colères noires pour des choses qui nous semblaient être des petits riens. Elle allait à l’école avec des pieds de plomb, faisait beaucoup de cauchemars.
Après les vacances de la Toussaint, l’école a commencé à m’appeler régulièrement pour venir la rechercher car elle était malade, elle se plaignait de maux de ventre violents, de diarrhées et de vomissements… Mais il n’y avait rien sur le plan médical ! Notre médecin de famille nous a orientés vers une psychologue qui a rapidement décelé chez Bibou une phobie scolaire, en lien avec une angoisse de performance, ainsi qu’un haut potentiel. Un bilan psychomoteur a aussi été réalisé, il a mis en évidence des difficultés en graphisme, des difficultés de régulation tonico-émotionnelle, des capacités attentionnelles fragiles (confirmées ensuite par un bilan neuropsychologique), une grande fatigabilité…
Le premier confinement a été bénéfique pour elle, Bibou a retrouvé son sourire et sa joie de vivre. Elle pouvait travailler à son rythme, sans se comparer aux autres. Et surtout, elle pouvait bouger, faire des pauses quand elle en ressentait le besoin, s’installer où elle voulait pour travailler (son endroit préféré, c’est par terre !). Ça nous a ouvert les yeux, et c’est ce qui nous a poussés à nous lancer dans l’aventure de l’IEF !

IEF écriture
Atelier d’écriture avec les 5 sens
Choisir l'instruction en famille après une phobie scolaire et prendre le temps d'apprendre
Expérience avec du chou rouge

L’instruction en famille (IEF) n’était donc pas votre choix initial. Avez-vous dû en famille modifier de nombreuses choses dans votre quotidien ?
En effet, ce n’était pas notre choix initial. En réalité, nous ignorions que nous avions la possibilité de choisir librement le mode d’instruction de notre enfant ! Nous nous sommes renseignés quand nous avons été confrontés aux difficultés que Bibou rencontrait, et au fil de nos lectures, nous avons découvert cette possibilité.
J’ai la chance d’être à la maison. J’ai lancé mon projet entrepreneurial courant 2020 et je travaille essentiellement de chez moi, donc niveau timing c’est plutôt bien tombé, et l’instruction en famille a été plutôt facile à mettre en œuvre. Ça a quand même nécessité quelques ajustements, nous avons par exemple revu notre organisation familiale, nous avons mis en place un conseil de famille, de nouvelles règles…
Mon activité professionnelle est importante pour moi et je n’ai pas envie de la laisser de côté, il a donc fallu nous organiser pour que Jérôme, qui lui travaille à temps plein, puisse prendre le relais. On sollicite aussi les papys et mamies qui sont autant ravis que Bibou, si ce n’est plus, de l’accueillir pour quelques jours, et qui prennent le relais de son instruction en lui proposant des activités qu’elle ne ferait pas forcément avec nous. Mais globalement ça n’a pas changé grand chose. On est juste plus sereins, plus libres, nous avons moins de contraintes horaires par exemple. Si un jour il fait super beau, on laisse de côté nos activités en cours et on fonce à la plage !

Peux-tu nous dire ce qui est le plus important pour toi dans l’instruction en famille que tu proposes à ta fille ? Quelles grandes idées te permettent de prendre tes décisions ?
Le plus important, c’est qu’elle puisse avancer à son rythme et qu’elle soit actrice de son instruction. Au début, je lui ai proposé des activités qui ressemblaient à ce qu’elle avait connu à l’école… Évidemment, ça n’a pas marché du tout ! Elle était en rejet total de tout ce qui ressemblait de près ou de loin à du travail scolaire. Alors j’ai tenté une approche par la pédagogie de projet, en partant des sujets qui l’intéressaient. Il y a eu la période « fourmis », puis la période « châteaux-forts », ensuite « hiver », puis « reine d’Angleterre »… En ce moment, on est dans les expériences scientifiques et la biologie.
J’aime beaucoup les pédagogies dites alternatives telles que Waldorf ou Charlotte Mason. Mais je dirais que je fais surtout au feeling, en restant à l’écoute des besoins de ma fille et en m’adaptant à elle.

IEF cuisine
Confection de nems

Pour l’instant la vie tout en IEF est encore relativement récente. Mais quels sont les hauts et les bas qui te marquent le plus dans ce nouveau rythme de vie ?
Le principal « bas » est indirectement lié à l’IEF et surtout lié au contexte actuel : le fait que Bibou ne puisse plus se rendre à ses activités extra-scolaires est difficile à vivre, pour elle comme pour moi. Pour elle, parce qu’elle aime ces activités, et qu’elles lui permettent de s’épanouir en dehors de son cercle familial, de rencontrer du monde, enfants comme adultes. Pour moi, parce que je suis en permanence avec elle et que ces moments où elle se rend dans ses différents clubs me permettraient d’avoir un peu de temps pour moi.
Sinon, il y a beaucoup de hauts mais un de ceux qui me marquent le plus est le fait que ma fille et moi nous sommes considérablement rapprochées, et que j’apprends énormément avec elle.

Mis à part le projet de loi à l’étude visant à interdire l’IEF, as-tu en tête une date de fin pour l’instruction en famille de tes enfants ?
Nous nous sommes lancés en septembre sans trop savoir où ça nous mènerait, et avec l’idée que ce serait une année « test ». Nous n’excluions pas la possibilité que Bibou retourne à l’école en septembre 2021. Mais nous avons tous bien évolué. Maintenant que nous avons goûté à l’IEF, nous ne voulons plus revenir en arrière !

Merci beaucoup Adelaïde de ton temps et de ton partage. Nous vous souhaitons de belles années en IEF !

Poetry Tea Time et IEF

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