L’instruction en famille (IEF) en France n’est possible que sur demande, c’est-à-dire en présentant un dossier qui peut-être accepté ou refusé. Au sein de ce dossier, on doit préciser la langue d’instruction. Peut-on choisir soi-même dans quelle langue faire l’IEF ou est-on vraiment obligé d’instruire en français ? On vous dit tout.
La langue d’instruction pour l’IEF en France
Petit rappel, en France, la demande pour avoir le droit de faire l’IEF se fait en lien avec un « motif » (pour reprendre le jargon de l’éducation nationale). Seul le motif 4 (lié à la situation propre d’un enfant) doit inclure une déclaration sur l’honneur concernant la langue d’instruction.
Le document officiel, un formulaire, est disponible là.
Il est clairement dit que le parent s’engage à « instruire majoritairement en langue française l’enfant ».
Majoritairement et non exclusivement.
Cela veut dire qu’au moins 50 % de l’instruction doit être faite en français. Le reste peut être dans une autre langue. Cela demande de faire des calculs savants, alors voici un exemple.
Une instruction majoritairement en français, c’est quoi ?
Pour l’expérience, je m’appuie sur le volume horaire d’un élève en classe de 5e (à consulter ici).
En 2024, un tel élève a 26h de cours par semaine.
On pourrait alors opter pour des cours strictement en français pour les matières suivantes : français, maths, arts plastiques, éducation musicale, sport et SVT. Cela fait un total de 14h30.
Il reste l’histoire-géo-EMC, la technologie, la physique-chimie et bien sûr les deux langues vivantes que l’on peut faire dans la langue de son choix.
On peut donc totalement choisir d’instruire son enfant en français, mais de faire l’histoire en langue vivante 1 (quelque soit la langue) et la géo en langue vivante 2.
Concrètement qu’attend-on de nous ?
Il ne faut pas se leurrer, ce document, cette attestation officielle, cible certaines langues bien spécifiques. Ainsi, il y a peu était diffusé sur les réseaux sociaux un documentaire sur un lycée parisien où les cours de maths sont en chinois. On est alors dans une valorisation sociale et économique et une chance incroyable pour les jeunes.
De même, certains établissements sont totalement bilingues depuis la maternelle, en particulier dans les zones frontalières mais pas seulement.
En instruction en famille, ce que l’on attend véritablement des parents est la possibilité de gérer tout le rendez-vous annuel avec l’éducation nationale en français. Les discussions ne sont qu’en français et l’enfant doit pouvoir répondre aux questions et faire des exercices strictement dans cette langue.
Toutefois, des études menées dans des écoles bilingues ont mis en avant que la langue d’instruction n’influence pas la réussite aux examens. Je ne pourrais pas vous retrouver la source, mais j’avais étudié ça il y a fort longtemps à la fac. L’étude était faite à partir des résultats au brevet et au bac d’établissements privés où l’instruction était donné à 100 % en breton.
Il faut donc faire preuve de discernement et ne pas hésiter à inclure de la transversalité (encore du jargon que les inspecteurs adorent) dans votre instruction. D’ailleurs, c’est pour ça que le fichier de géographie niveau collège sur l’Inde contient des documents à étudier en anglais ou en français (à l’adulte en charge de l’instruction de choisir la langue au moment de l’impression).
Quelle langue choisir en dehors du français ?
Pour passer le brevet en candidat libre, une épreuve de langue vivante (niveau A2) est à prévoir. Dans toutes les académies, l’anglais est disponible. Ensuite, suivant les régions, on peut choisir allemand ou espagnol. Attention, c’est variable et sans lien direct avec la proximité d’une frontière. Il faut donc bien se renseigner en amont.
Autrement, voici quelques critères pour choisir une langue vivante (LV) en toute connaissance de cause.
– En cas de rescolarisation, est-ce que l’enfant est prêt à poursuivre sa LV avec des cours à distance (via le CNED) ou préfère-t-il aller en cours avec le reste de sa classe ? Dans le second cas, il est nécessaire de vérifier les langues proposées dans votre secteur.
– Pour le bac, quelles sont les modalités d’examen pour les langues qui l’intéressent ? Ainsi certaines langues demandent de se déplacer à Paris pour l’épreuve d’option…
– Y-a-t-il un projet professionnel ou familial ? Que ce soit un voyage ou des grands-parents présents et locuteurs d’une langue bien spécifique.
On progresse beaucoup mieux dans l’apprentissage d’une langue avec laquelle on a une affinité, que ce soit pour discuter avec mamie ou regarder des dessins animés. Je sais que la plupart des enseignants utilisent des arguments professionnels et des questions d’avenir, mais on oublie dans ce cas un détail important. Une langue est professionnellement un atout si elle est maîtrisée. Une maîtrise parfaite de l’arabe vaut toujours bien plus qu’un anglais médiocre.
Donc mon conseil en tant que prof de langue : privilégiez les langues dans lesquels vous et votre enfant aurez la possibilité de progresser, voyager et évoluer.
La liberté des langues en IEF reste bien réelle
Ce qu’il faut retenir c’est donc que l’enfant doit envisager sa scolarité et ses examens en français. Mais il ne faut pas exclure les autres langues, y compris pour construire son instruction. Un collégien peut regarder des documentaires en anglais ou en allemand sur la Seconde Guerre mondiale pour ses leçons d’histoire !
Côté langue vivante, tant qu’on est en IEF, on peut vraiment choisir la langue de son choix, mais il faut tout de même garder dans un coin de la tête une possible (re)scolarisation pour l’anticiper au besoin. Il ne faut pour autant pas trop se stresser car le CNED peut aider à poursuivre la langue voulue, tandis qu’un apprentissage intensif sur quelques mois peut mettre l’enfant à niveau dans une nouvelle langue juste avant la rentrée.