Tenir un journal en langue étrangère, journal de bord ou journal intime, est une pratique simple, peu coûteuse et qui a des véritables avantages dans l’apprentissage. Par ailleurs, c’est une activité qui peut être proposée en classe ou en club de langue ou que l’on peut faire en toute autonomie. C’est accessible quasiment dès que l’on se lance dans l’apprentissage d’une langue étrangère. Il n’y a pas vraiment d’âge idéal car chacun aura son propre carnet et sa façon de faire. Par contre les bénéfices seront sensiblement les mêmes pour tous.
Il peut même s’agir d’une activité à faire avec un enfant qui apprend à écrire dans sa propre langue. Il s’agit alors d’enfant en élémentaire, qui ont compris la base de l’écriture. Toutes les photos avec du texte en français viennent du carnet tenu par ma fille. Les autres photos sont de mon propre carnet de langue.
Tenir un journal – bien commencer
La motivation est essentielle dans les apprentissages. Pour certains, elle est stimulée par un joli cahier et un crayon confortable. C’est pourquoi il ne faut pas hésiter à choisir un beau cahier qui vous soit agréable. Ainsi j’avais acheté à ma fille tout un lot de cahiers illustrés avec des planètes puisqu’elle adore la conquête spatiale. Pour moi, je privilégie l’épaisseur du papier car j’aime utiliser des crayons très différents.
Voici plusieurs conseils pratiques :
→ Pour une personne qui aime beaucoup dessiner, privilégier un carnet alternant page lignée et page blanche, voire même, acheter un carnet avec strictement des pages blanches.
→ Pour un enfant qui apprend à bien écrire (dans l’approche esthétique de la graphie), il est vraiment nécessaire de prendre un cahier ligné avec des lignes seyès. Ces derniers ont des couvertures souvent moches (quoique moi, j’avais acheté un cahier avec une illustration des fables de la Fontaine) mais il est toujours possible de faire un collage personnel par-dessus.
→ Pour quelqu’un qui écrit peu ou qui est rapidement intimidé par l’ampleur de la tâche, un tout petit cahier peut rassurer car en peu d’effort une première page est terminée.
Côté stylo, là encore, tout dépend de vos goûts. Il est même possible de tenir son journal en format numérique, surtout si la langue étudiée possède le même alphabet que le français.
Enfin, dernier point important, il faut se fixer une certain régularité. Il est préférable, surtout dans les premiers temps de privilégier une phrase tous les jours que 10 phrases une fois par semaine.
Trouvez un moment idéal : pendant le petit déjeuner, dans le bus, avant de quitter votre bureau pour faire la pause déjeuner ou avant de commencer à étudier.
Écrire dans son journal de langue étrangère
On peut tout écrire et surtout tout ce qui vous concerne directement. Bien sûr au départ, quand on débute, on est limité en vocabulaire. Écrire « cette nuit, j’ai bien dormi » peut sembler impossible. Par contre il est toujours possible de dire « j’apprends l’italien ».
Certains apprenants optent pour des carnets dédiés à leur pause déjeuner, décrivant le nom des plats, les personnes présentes ou le lieu où ils étaient. D’autres en profitent pour écrire quelques phrases sur l’actualité, entendue à la radio ou lue dans le journal.
Le sujet est bien moins important que le fait d’écrire !
Au fil du temps, avec l’entraînement et la poursuite des cours de langue, les phrases seront plus longues, plus complexes ou même plus précises. Bien sûr il y aura des fautes, des tournures pas toujours compréhensibles pour un natif. Il est alors possible de s’auto-corriger quelques mois plus tard, si on en ressent le besoin.
Les avantages à écrire un journal pour apprendre
Les avantages sont vraiment nombreux et c’est surprenant que ce ne soit pas plus utilisé en classe.
Je connais tout de même personnellement une enseignante d’élémentaire qui pratique le journal de bord avec ses élèves en anglais, ainsi qu’une enseignante à l’université. Moi-même, j’ai eu l’obligation de le faire lors d’un séjour scolaire au collège.
→ Rendre l’apprentissage concret
Dans certains cours, on répète tous « I’m French, I live in Paris », peu importe que l’on soit en réalité franco-libanais et que l’on habite Montreuil. Et même si certains exercices permettent de parler de soi, dans le journal, on ne fait que ça, parler de soi, réellement.
→ Se préparer à de futurs discussions
Je me souviens que lors de mon premier voyage solo (en Australie), tous les soirs ma famille d’accueil me demandait ce que j’avais fait de ma journée. Tenir un journal, c’est préparer ce genre de réponse, organiser ses idées et pouvoir par la suite les dire à quelqu’un (ou écrire à un correspondant).
→ Enrichir son vocabulaire
Aucun cours ne donne tout le vocabulaire dont on a besoin, personnellement. Il y a toujours une part de recherche personnelle à faire. Là, ce simple exercice d’écrire régulièrement dans un journal va vous demander d’ouvrir le dictionnaire et vous aider à apprendre de nouveaux mots.
→ Entraîner le geste
Il s’agit ici d’un avantage qui concerne les enfants qui apprennent à lire et ceux qui étudient une langue avec un système d’écriture différent. La main s’entraîne à former des lettres ou caractères reconnaissables et donc bien lisibles.
→ Associer le geste et la mémoire
Cela ne concerne pas tout le monde, toutefois de nombreuses personnes retiennent mieux en associant le geste à l’idée. Écrire de nouveaux mots les ancre plus facilement dans la mémoire.
→ Prendre soin de soi
Tenir un journal personnel à des effets thérapeutiques, même dans sa propre langue. Cela permet de se poser, de faire le tri dans ses idées. Alors bien sûr quand on peut juste écrire « Ho bevuto un caffè » (j’ai bu un café), l’impact est limité. Par contre écrire « Oggi, sono stressata » (aujourd’hui, je suis stressée) contribue à votre bien-être comme l’a montré le chercheur James W. Pennebaker. Dans les faits, il faut s’impliquer dans son écriture et écrire des pensées importantes. En savoir plus : le livre de James Pennebaker ou notre article interview sur la gestion des émotions.
Réponses aux fausses excuses pour ne pas se lancer
Je ne doute pas que vous avez en tête de nombreuses raisons de ne pas le faire tout en ayant l’impression que ce serait une bonne idée. Je ne dis pas que c’est pour tout le monde, mais si vous êtes arrivé jusqu’ici dans l’article, c’est que c’est probablement pour vous ou vos apprenants (enfants ou élèves), au moins le temps d’essayer.
→ Je ne connais pas assez de mots
J’ai volontairement choisi des exemples très simples ci-dessus. Bien sûr, quand on débute les phrases sont courtes et les articulations maladroites. Ici, il ne s’agit pas de juger de la quantité ou même de la qualité, mais d’oser et de faire de son mieux.
Utiliser un dictionnaire ou même un traducteur en ligne est un bon outil !
→ Je n’ai pas le temps
Nous avons tous tout le temps nécessaire pour les choses importantes pour nous-même !
Tenir un journal peut prendre 5 minutes par jour, rien de plus. Si l’apprentissage d’une langue compte vraiment, il est facile de trouver 5 minutes. Si c’est véritablement insurmontable, cela dit plus de votre motivation que de votre emploi du temps. Et ce n’est pas grave, tout le monde n’a pas les mêmes priorités.
→ Je ne sais pas quoi écrire
Il est toujours possible de commencer par « je ne sais pas quoi écrire ». Ma fille a écrit dans son cahier a plusieurs reprises « j’écris car je veux apprendre à écrire, mais je déteste ça. »
On peut lister ce qui nous motive à apprendre une langue, ce que l’on a mangé, ce que l’on veut faire, ce que l’on aime, ce que l’on déteste. Il y a vraiment beaucoup de choix.
→ J’apprends plusieurs langues, ce serait compliqué
C’était mon excuse initiale. Que choisir entre les différentes langues qui m’intéressent. Au final, j’ai choisi d’écrire dans la langue qui m’inspire le jour en question. Je n’ai pas le même niveau dans chaque langue, je ne peux donc pas dire les mêmes choses. Ce n’est pas grave.
Conclusion
Il ne s’agit pas d’écrire pour publier le prochain best-seller international, mais d’écrire pour atteindre un but précis : développer ses compétences en langue étrangère. C’est un projet plus ou moins personnel, il peut comporter des ratures ou des dessins, des rêves ou des déprimes.
Et vous, avez-vous déjà eu l’occasion de tenir un journal en langue étrangère ? Pensez-vous le proposer à vos enfants ou le faire vous-même ?