Les plus assidus du blog le savent déjà, mon amoureux est archéologue, bien qu’historien de formation. Par ricochet, notre fille et moi-même avons bien plus de connaissances en histoire que je ne le pensais possible. En général, cela nous donne envie d’en savoir encore plus car l’amoureux en question est le premier à hurler au scandale face à la moindre erreur historique dans les livres ou les manuels. Alors quand j’ai découvert l’existence du magazine Voyages en archéo, j’ai voulu le lire. Non pas pour développer une passion pour l’histoire mais car l’autrice est archéologue de formation. Cela change des publications très nombreuses par les professeurs et les passionnés. Je vous explique tout ça après avoir présenté ce magazine.
Le numéro 1 de Voyages en archéo m’a été envoyé gratuitement, l’avis ci-dessous n’en reste pas moins personnel.
Public | De 7 à 12 ans |
Utilisation | En famille ou en autonomie |
Compétence du socle commun | Diverses compétences comme lire pour comprendre ou relier des caractéristiques d’une œuvre d’art au contexte historique et culturel de sa création |
Type de pédagogie | Non concerné |
Prix | 12 € le numéro ou 40 € l’abonnement à 4 numéros – voir les offres |
Présentation du Voyages en archéo
Derrière le nom Voyages en archéo, il y a Agathe Brac, archéologue de formation et médiatrice culturelle et scientifique. Elle propose sous ce nom des ateliers (qui ne sont pas le sujet de cet article) et un magazine dont le premier numéro est sorti en janvier 2023.
Ce magazine d’archéologie pour enfants est un trimestriel qui se concentre sur une culture à chaque numéro. L’ensemble se veut ludique et instructif et cible les enfants de 7 à 12 ans.
Que contient le magazine Voyages en archéo ?
Il y a 36 pages et zéro publicité. L’impression est effectuée en France, sur du beau papier.
Il y a une double page bricolage (totalement pertinente par rapport à la thématique et apportant des connaissances en plus, bref, pas juste pour « bricoler »), une double page recette, quelques pages de jeux (dont une enquête) et plusieurs pages documentaires.
On y trouve aussi bien une présentation du site qui sert de base au thème du magazine (pour le numéro 1 il s’agit du village des artisans travaillant sur les tombeaux de Pharaon) ainsi que des informations sur les fouilles qui ont eu lieu sur place. Par exemple, le nom de l’archéologue en charge des fouilles est donné, ainsi qu’un petit point sur le site archéologique aujourd’hui.
Quelle différence que ce soit conçu par un prof, un archéologue ou un passionné ?
Je pense que les passionnés peuvent tout à fait prendre la parole et le faire correctement sur leur sujet de prédilection. Mais avec le temps, quand il est question d’histoire, j’ai pris conscience d’une différence entre ceux qui sont en contact direct et permanent avec la recherche et tous les autres. Attention, c’est une généralité : bien sûr il y a toujours des exceptions.
Les professeurs et les passionnés oublient parfois que l’histoire est une science et que ce que l’on sait est et sera toujours une version tronquée du passé. C’est les entendre dire que la ville « Uruk » s’écrit ainsi et non « Ourouk », sans débattre de l’influence historique et idéologique derrière les mots. Il y a aussi le fait que les manuels cherchent à transmettre un savoir qui doit être évaluable, ce qui limite les nuances. Ainsi, on présente bien souvent l’Égypte Antique dans une belle unité, sans montrer de façon très explicite qu’il s’est écoulé autant de temps dans cette période qu’entre le règne de Clovis et nous…
Le seul défaut que je pourrais poser sur le dos des historiens et archéologues est leur précision. Mais dans le cadre d’un magazine (ou même d’un livre), j’adore. Rien ne m’empêche de lire un peu plus vite et de supprimer de mon cerveau la définition de sémedet et médjayou (si ça vous intéresse, c’est dans le numéro 1 de Voyages en archéo).
Cela signifie qu’ils donnent le contexte et qu’ils limitent les généralités. Ce goût pour la précision fait que certains se spécialisent dans la fabrication de pipes en bois autour d’un village du nord de la France à un siècle donné alors qu’un autre étudie les objets marqueurs de l’élite dans le Japon médiéval (exemples réels).
Le résultat est directement présent dans ce magazine. L’autrice, archéologue et médiatrice de formation, s’est concentrée sur un élément très précis, souvent mis de côté car moins prestigieux : les artisans des tombeaux de Pharaon. C’est ultra spécifique mais c’est passionnant, la majorité des informations n’était dans aucun des livres que nous avons lus jusqu’à présent.
Mon avis sur Voyages en archéo
J’avais une petite crainte avant de recevoir le magazine : que nous connaissions déjà tout ce qu’il contient. Ce qui m’a donné envie ou plutôt ce qui m’a laissé à penser que je serai satisfaite est l’activité incluse. Il n’est pas question de faire du dessin sur papyrus, d’écrire son prénom en hiéroglyphes ou de dessiner l’œil d’Horus sur un bijou (les activités que tous les blogs proposent). À la place, on plie du papier pour se fabriquer des bijoux. Cela questionne la durée de vie d’un bijou et sa préciosité.
L’activité créative est selon moi la meilleure représentation de l’esprit du numéro 1 de Voyages en archéo. Alors que le sujet est hyper classique (les Égyptiens et les pharaons), le contenu sort des sentiers connus. Les textes sont clairs, il y a un bon équilibre jeux / documentaires. Les illustrations ont un petit côté simple mais ça fonctionne très bien avec l’ensemble.
La cible est les enfants de 7 à 12 ans et je suis aussi d’accord avec ça, même si les plus jeunes pourraient préférer une lecture à voix haute face au vocabulaire riche.
Les seuls lecteurs qui pourraient être déçus sont ceux qui sont curieux du métier d’archéologue. Il y a bien deux doubles pages en lien direct (dont une en format jeu), mais il n’y a pas d’illustrations à ce sujet. Pour moi, ce n’est pas gênant, le côté historique / culturel étant primordial. Mais je sais combien ce métier fait rêver et le titre pourrait tromper quelques enfants.
Au final, la seule raison pour laquelle j’hésite fortement à abonner ma fille, c’est à cause du thème du prochain numéro. Il sera sur la préhistoire et on a tellement vu et fait sur cette période que je crains la déception. Par contre, ensuite il y aura les Mayas et ça, ça me tente bien. J’espère qu’il y aura aussi des thèmes comme les Khmers et Angkor Wat et peut-être même une réflexion sur le fait que les Français ont pillé les statues pour les exposer en France (les petits bonus de la colonisation). Ce qui fait que je serai très curieuse de lire sur des civilisations peu fouillées par les Français comme les Aïnous ou des choses carrément différentes comme l’archéologie sous-marine (on avait rencontré un archéologue spécialisé dans la piraterie !). En tout cas, je vais surveiller l’évolution de ce magazine.
Erratum : l’autrice m’a contactée car les thèmes annoncés dans l’abonnement son strictement indicatif. En réalité le numéro 2 sera sur les jeux de la Rome antique. Rien à voir avec la préhistoire !
Les plus | Les moins |
|
|
Conclusion
La démarche du magazine Voyages en Archéo me fait penser à mon article comment enseigner l’histoire sans prendre partie. Je suggérais de faire un pas de côté, de sortir des apprentissages officiels. L’objectif était de donner du relief à l’Histoire pour mieux repérer certains biais.
C’est exactement ce qu’il se passe avec ce premier numéro de Voyages en archéo. On pourrait se dire que le contenu ne ressemble pas à ce qui est au programme de 6e, mais ce n’est pas totalement le cas. En comprenant comment des archéologues ont pu fouiller un village d’artisans, en tournant les projecteurs vers des artisans justement et non juste les puissants, on se construit une autre vision de l’Égypte. C’est ce qui fait que ce magazine n’est pas une redite au milieu des centaines de livres sur le sujet.